Exercices de style de Raymond Queneau

Publié le par Sharkie343

 

Éditions Folio 1947. 154 pages.

http://www.livraddict.com/biblio/couverture/couv35385875.jpg

 

«Le narrateur rencontre, dans un autobus, un jeune homme au long cou, coiffe d'un chapeau orné d'une tresse au lieu de ruban. Le jeune homme échange quelques mots assez vifs avec un autre voyageur, puis va s'asseoir à une place devenue libre. Un peu plus tard, le narrateur rencontre le même jeune homme en grande conversation avec un ami qui lui conseille de faire remonter le bouton supérieur de son pardessus. Cette brève histoire est racontée quatre-vingt-dix-neuf fois, de quatre-vingt-dix-neuf manières différentes».

 

________

 

Cette chronique va être spéciale, car on est le 29 février :D Nah je déconne.

 

Cette chronique va être ardue à écrire plutôt, car il n'y pas de style fixe, ni de personnages auquels s'attacher, pas plus de péripéties surprenantes... Toutefois, je vais pouvoir glisser des extraits : les versions que j'ai apprécié le plus et celles que j'ai apprécié le moins. Pour ceux qui ne m'ont pas trop impressionné, c'est majoritairement ceux qui consistait aux mouvements des lettres dans les mots (qui furent trop nombreux à mon goût) si vous voyez ce que je veux dire. Au cas où non, voici l'exemple de Métathèses :

 

Un juor vres miid, sru la palte-frome aièrrre d'un aubutos, je requarmai un hmome au cuo prot logn et au pacheau enrouté d'une srote de filecle. Soudian il prédentit qeu sno viosin liu machrait votonlairement sru lse pides. Mias étivant la quelerle il se prépicita sru enu pacle lirbe.

Duex heuser psul trad je le rvise denavt la grae Siant-Laraze en comgnapie d'un pernosnage qiu liu dannoit dse consiels au suejt d'un botuon.

 

Parfois, c'est un casse-tête amusant et pas si difficile si ça fait déjà une vingtaine de fois que  l'histoire a été lue, mais ça m'a donné des mals de crâne, j'ai eu simplement l'impression de lire un illetré et que l'auteur s'est piqué un délire qu'il est le seul à rire... Heureusement, il y en a qui font vraiment sourire, voir rire. Il y a celui des Anglicismes : :

 

Un dai vers middai, je tèque le beusse et je sie un jeugne manne avec une grète nèque et un hatte avec une quainnde de lèsse tressés. Soudainement ce jeugne manne bi-queuzme crézé et acquiouse un respectable seur de lui trider sur les toses. Puis il reunna vers un site eunoccupé.

A une lète aoure, je le sie égaine ; il vouoquait eupe et daoue devant la Ceinte Lazare stécheunne. Un beau lui guivait un advice à propos de beutonne.

 

C'est à ce lire avec un accent anglais et à voix haute de préférence. Il y a d'ailleurs la même chose avec des Italianismes. Vous vous disez peut-être maintenant que ce livre est donc tout à fait n'importe quoi et bien c'est faux. Il y a en effet des textes complètement en français, riche en vocabulaire, bien pensé et qui nous rapelle que notre langue est magnifiquement vaste. On peut lire la banale histoire en Alexandrin, en Ode, en Comédie, etc. Là se montre la brillance de l'auteur qui a réussi à trouver autant d'idées originales. Ci-dessous, mes préférés, la première étant à la façon Gustatif :

 

Cet autobus avait un certain goût. Curieux mais incontestable. Tous les autobus n'ont pas le même goût. Ça se dit, mais c'est vrai. Suffit d'en faire l'expérience. Celui-là - un S - pour ne rien cacher - avait une petite saveur de cacahouète grillée je ne vous dis que ça. La plate-forme avait son fumet spécial, de la cacahouète non seulement grillée grillée mais encore piétiée. A un mètre soixante au-dessus du tremplein, une gourmande, mais il ne s'en trouvait pas, aurait pu lécher quelque chose d'un peu suret qui étaut un cou d'homme dans sa trentaine. Et à ving centimètre encore au-dessu, ils se présentait au palais exercé la rare dégustation d'un galon tressé un peu cacaoyé. Nous dégustâmes ensuite la choigne-geume de la dispute, les châtainges de l'irritation, les raisins de la colère et les grapppes de l'amertume.

Deux heures plus tard nous eûme droit au dessert : un bouton de pardessus... une vrai noisette...

 

  Il y a les 4 autres sens aussi. Bref, pour poursuivre, l'essai Métaphoriquement :

 

Au centre du jour, jeté dans le tas des sadines voyageuses d'un coléoptère blanchâtre, un poulet au grand cou déplumé haranga soudain l'une, paisible, d'entre elles et son language se dloya dans les airs, humide d'une protestation. Puis, attiré par un vide, l'oisillon s'y précipita.

 

Dans un morne désert urbain, je le revis le jour même sa faisant moucher l'arrogance pour un quelconque bouton.

 

Dorénavant, il ne vous reste plus qu'à lire les 95 autres (aux noms tel que  Poor lay Zanglay, Loucherberm, Homéotéleutes, tutti quanti, souvent inconnus à ma culture ce qui m'a fait titillé...). Si l'expérience vous tente, lancez-vous, ça se lit vite ( mais à petite dose, mon rythme de croisière fût de 50 pages par jour personnellement). Exercices de Style va plaire à ceux qui ont un intérêt pour l'écriture principalement, je crois que ça dépend vraiment de chacun. Je ne sais donc pas trop si je le recommanderais -pas à n'importe qui en tout cas. De mon côté, j'ai passé un bon moment, mais sans plus. Je n'ai pas plus envie de découvrir un autre oeuvre de Raymond Queneau car ici, on ne peut pas vraiment déceler l'auteur ce qui est dommage.

 

Ce livre faisait partie de mon challenge ABC, il en est le quatrième titre lu.

Pour être informé des derniers articles, inscrivez vous :
Commenter cet article